LAH ybarek f 3mer Si Tbib

Publié le par Amine

 



   Tout est propice dans mon cher pays pour que médecin rime avec mégalomanie.

Depuis que j’ai trouvé mon nom retenu sur la liste des admis à la tant convoitée faculté de médecine, un long processus de façonnage de la personnalité du Tbib s’est déclenché.

 

     Ainsi, notre première rencontre avec le Prof s’est soldée par un orgueil bien rembourré ! Vous êtes la crème des crèmes, l’élite des élites, le top du top…

     Lors des stages hospitaliers, voici l’état d’âme que l’on nous inculque, le médecin doit rester digne de ce titre, en évitant tout « excès » d’affection envers ses malades, ou du moins, éviter de le laisser apparaître. « Restez professionnel ! » nous répétait-on.

 

     Je me souviens du matin ou j’ai eu droit à une leçon de bonne conduite de la part du Prof, pour avoir parlé au malade à travers la fenêtre de la chambre d’hospitalisation : c’est indigne d’un médecin !

Je sais bien que les fenêtres c’est fait pour aérer, mais je me demande à ce jour, qu’y a-t-il de mal à parler à travers !

 

     L’on ne conçoit pas que Si Tbib se penche par exemple pour ramasser les sandales de la vieille dame qui les a perdu en montant sur le brancard…encore moins qu’il accompagne le vieux grabataire aux toilettes du service…y a des gens qui sont sensés faire ça…

 

     A l’hôpital provincial, loin des grandes villes, le processus de « gonflage » bat son comble : Sbah lkhir Si tbib, merhba b Si Tbib, Tbarkelah 3la Si Tbib…rien à envier aux chefs d’état dans leur balade à travers les fidèles citoyens.

 

      Il est très rare d’échapper à ce sentiment de supériorité, cette folie de grandeur…tu te surprends en train d’ajuster le stétho autour du cou, de calculer tes pas et les cadencer pour faire plus « médecin ».

 

      Un matin de garde aux urgences, Si Tbib reçoit une jeune fille en crise d’asthme. En vrai Tbib il prescrit des séances de nébulisation, des injections de corticoïdes, rédige une ordonnance de sortie et oriente même vers un allergologue…la classe quoi !

      À midi, Si Tbib remballe sa tenue et se retrouve à la station des grands taxis (Taxi byed), se mêlant à la foule pour décrocher une place dans ce moyen de locomotion très « convivial » (6 passagers par véhicule moulés l’un contre l’autre). Si Tbib est alors surpris de constater qu’il partage taxi byed avec sa malade du matin : Salam Docteur ! Lui lance t-elle aussi surprise que lui…Si Tbib ressent son orgueil bafoué et ne peut s’empêcher de regretter un petit taxi au moins (Taxi zre9 pour les Rbati, 7mer pour les Casaoui), pour seulement quelques dirhams de plus, bien que ça vraie place soit derrière le volant d’une voiture qui sait lui laisser l’honneur sauf !

 

     Jamais la modestie ne se confond avec professionnalisme ou rigueur…et la crise de modestie, je me peine à trouver des médecins qui en échappent. Rester humble et simple, et surtout sensible et fin à l’égard de ses patients, c’est là le vrai prestige d’un médecin.

 

قال رسول الله صلى الله عليه و سلم: ( مَنْ تَوَاضَعَ لِأَخِيهِ الْمُسْلِمِ رَفَعَهُ اللَّهُ، وَمَنْ ارْتَفَعَ عَلَيْهِ وَضَعَهُ اللَّهُ )

 

Publié dans Etre Tbib au Maroc

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S
<br /> Trés bien dit , bon courage dans vos revendications.<br /> <br /> <br />
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A
<br /> <br /> Merci de votre passage !<br /> <br /> <br /> <br />